samedi 22 décembre 2012

L'amer Noël du fils du père Fouettard

Je suis las. Physiquement et moralement. Sûrement comme toi, lecteur. Les fins d’années se suivent et se ressemblent. Durant l’enfance, les fêtes de Noël me maintenaient au moins le moral au beau fixe. La neige sur les toits et trottoirs de ma ville, les lucarnes éclairées jusque tard dans la nuit, les cadeaux au pied du grand conifère fraîchement coupé. Puis vers la fin de l’adolescence, pfuiiit. Disparue la magie. Aujourd'hui, j’attends le 1er février. Impatient. Parce que toujours un con pour te courir après avec ses vœux en claironnant qu’il a jusqu’au 31. Au secours. L’envie irrépressible de prendre mes jambes à mon cou. Mais il me rattrape par la manche. Alors je lui serre la main ou lui tape la bise en espérant qu’il passe sous une bagnole dans les douze mois à venir. Finalement, l’odeur du sapin ne m’a pas tant quitté que ça. Bon ok, c’est Noël.  Souhaitant quand même que le gars s’en sorte. Juste une guibole au père Lachaise ou les deux. Mais ça ne marche jamais. Avec le nombre de mains serrées et de joues léchées chaque début d’année, les culs de jatte, ça devrait courir mes rues. Même pas.

Comment on ne désire pas le malheur de son prochain ? M’en fous. Mon prochain n’a qu’à posséder un minimum d’humour afin de flinguer les rituels lourdingues. Ca va finir par se retourner contre moi, dis tu fidèle lectrice du flibustier, petit blog pourtant sans horoscope ni prétention. Raisons pour lesquelles je me demande ce que tu fous encore là. Je ne suis pas superstitieux. Ca porte malheur. Ouarf, ouarf. Tiens, au passage, voilà une communauté qui me hérisse le poil. Les grands adeptes des petites croyances. Qui te serinent avec, pour tout geste du quotidien. Toucher du bois pour conjurer le mauvais sort, par exemple. Pensée amicale au bûcheron qui, un beau jour, se prend son arbre sur le coin de la tronche. Mais sans doute s’était-il levé du pied gauche. Je ne suis pas persuadé que cela fasse s’esclaffer les unijambistes… de droite. Stop. Je passerai sous silence les plus fanatiques qui te pousseraient sous une échelle pour éviter de croiser un chat noir.  

Ta crédulité légendaire servira toujours de fonds de commerce aux charlatans de la voyance. Le canular préféré d’un vieux pote. Prendre rendez-vous chez une Mme Irma de pacotille, s’asseoir en face d’elle et lui retourner une mandale de compétition en lui demandant si elle l’avait vue arriver. Il a stoppé net la plaisanterie. Il arrive un âge où son record collégien du 100 mètres ne suffit plus pour semer le vrai rottweiler de la fausse voyante, animal remarquablement dressé capable de lire dans tes boules ou les lignes de ta main. Enfin, de ton moignon. Mais peut-être existe-t-il de par le monde ce clown de prophète, enfin voulais-je dire cet auguste augure ? Bien que cela me paraisse aussi improbable que de trouver un calendrier des postes maya de 2013… Je te laisse à tes chimères. La faim de mon monde est proche. Tant mieux, la boulangerie aussi. Ne pas oublier la bûche. Pour douze personnes. Tu pourrais me remercier naïve lectrice en cloque. Tu ne devrais pas être loin de la fausse couche en parcourant mes horreurs proférées. Sans quoi nous étions treize à table.

dimanche 16 décembre 2012

Alain sous miss


Il ne faudrait pas vieillir. Sombre pensée revenant en boucle quand j’observe ou écoute un être chéri qui me déçoit. Que ce dernier fusse connu du grand public ou simplement proche de moi, d'ailleurs. Cette semaine encore. Alain Delon. Non lectrice septuagénaire voire moins, ne commence pas à te précipiter, petite culotte au vent, sur les chemins menant à mon humble demeure des fois que le Tricao soit cousin, neveu ou fils illégitime de star. Ni toi lecteur, toujours prompt à venir ricaner sous mes fenêtres sur mes goûts cinéphiles archaïques comme l'abruti séculaire que tu es. Oui, je suis fier de penser que celui qui incarna Francis dans Mélodie en sous-sol est un des plus grands acteurs encore vivants et je t’emmerde. Un homme qui a tourné sous la direction de Melville, Visconti, Clément, Lautner, Deray, Losey, Verneuil ou autre Bertrand Blier ne peut m’inspirer qu'une haute considération. Oui mais voilà, c’était avant le drame. Le zapping dominical m’a tué. Le petit écran a flingué mes dernières illusions.

Alain, vous permettez que je vous appelle Alain ? Non ? Bon alors Roger, comme le fameux Sartet, associé malfaiteur victime de siciliens réputés pour leur honneur tatillon. Ou alors Hugo, à l’instar du gitan dépeint sans loi mais avec foi par José Giovanni. Mais je continuerai à vous vouvoyer, Monsieur Delon. Par respect. Bref. Alain, pourquoi aller se perdre définitivement dans cette supercherie digne d’une foire bovine qu’est cette élection du plus beau croupion hexagonal accompagné de pommes plus dauphines que les autres ? Je parle à l’esthète, au charmeur, à celui qui fût le symbole d’une galanterie hélas désuète. Au prince qui a côtoyé la beauté fatale de reines comme Romy Schneider et Claudia Cardinale ou le caractère bien trempé d’une Simone Signoret. Est-il possible que le Tancredi du Guépard s’efface devant les hyènes télévisuelles ? Que la Tulipe Noire devienne mauvaise herbe au contact du ciment brut de la Bouygues Company ? 

Vous vous définissez souvent sous l'appellation d'« homme libre ». Mais la liberté n’est pas d’accepter n’importe quoi. De frayer avec n'importe qui. Question de choix. C’est le vôtre. Ok. Tant pis. Je me contenterai de ressortir des cartons mes vieux DVD comme Mère Grand devant son classeur de photos jaunies d’où s’échappent mélancolie et nostalgie du temps jadis. Roch Siffredi, Gino Strabbliggi, Corey, Robert Klein, Edouard Coleman, Xavier Maréchal et le silencieux Jeff Costello seront sept images gravées à jamais dans ma mémoire. Ma famille Delon. Bonne pioche. Vous êtes avec Belmondo les derniers mohicans de ce que les maudits cons appelaient péjorativement le cinéma à Papa. Je vous tire mon Borsalino à ce titre.

Il n'y a pas de plus profonde solitude que celle du samouraï. Si ce n'est celle d'un tigre dans la jungle… Ou celle d’un aficionado delonesque devant Miss Charolais. Adieu l'ami.

dimanche 9 décembre 2012

Noir délire



« Si tu étais une couleur ? ». Question insolite tôt le matin devant mon mug. Pas moyen de déjeuner en paix. Plus rien ne me surprend sur la nature humaine. Eicher avait raison. Melle Proust attablée en face de mézigue, le stylo bien en pogne. Ifop ou la Sofres ? Toutefois je pencherais davantage en faveur d’un portrait chinois pondu par Djeun’s Mag, le mensuel des boutonneuses smartphonophiles et parentophobes.
Fulgurance de ma réponse malgré le brouillard régnant dans toute cafetière à cette heure vespérale. Une couleur ? Le noir. Nero. Schwarz. Negro. Black. Quoi pas une couleur ? Ben tiens.

Noir comme le caoua du condamné au travail forcé qui me donne les pulsations suffisantes pour entamer ce marathon quotidien de l’existence. Mon seul dopage mais multi doses.
Noir comme le regard de ta mère quand je ne me souviens plus ce qu’elle vient de me dire trente secondes avant.
Noires comme mes idées devant la trotteuse de ma tocante qui file à la vitesse de ton enfance bientôt révolue.
Noir comme l’humour dont j’aime à me servir en tant qu’arme factice pour te provoquer, te titiller dans tes certitudes, ou par simple politesse du désespoir que m’inspire le reste de l’(in)humanité. 
Noirs comme les genres littéraire et cinématographique qui me poussent à ouvrir des portes, à aller à la rencontre d’auteurs me dévoilant l’évasion ou l’écorchure comme une nécessité.  
Noirs comme les doigts du guitariste de génie faisant pleurer sa Stratocaster sur Red House, témoin virtuose de la rencontre des notes de couleur autour du blues, du jazz, du rock, de ce que tu veux mais vivantes à jamais.
Noire comme la nuit, mon royaume peuplé de princes et de fantômes, de bons apôtres et de vauriens, de poètes et de bohémiens.

(Interlude musical. Caser Jimi Hendrix et Daniel Guichard dans le même billet, t’avoueras lecteur que t’en as pour ton fric, toi l’abonné gratuit du cri flibustier !)

Noire comme la représentation sobre et ultime de l’élégance vestimentaire jamais très éloignée de celle de l’esprit si chère à mon cœur. Ne te méprends pas lectrice, il m’est arrivé de croiser d’accorts clodos et de déguenillés snobinards.
Noir comme le drapeau qui incite à la révolte, à la mutinerie, elles mêmes issues de la colère salvatrice. Colère noire évidemment, perspicace lecteur.
Noir comme le mouton pointé du doigt par la clique bêlante et pour qui je conserve malgré tout une oreille attentive.
Noir comme cet écran d’ordinateur devant lequel je cherche l’inspiration toujours dans l’urgence alors que rien ni personne ne me l’impose. Juste le mode d'écriture du scribouilleur paresseux ?

Alors, m’dame Ipsos, heureuse ? Comment ça, ma réponse ne rentre pas dans les cases ? Clooney, remets la tienne avant qu’j’te flingue, l’ami Ricoré ! What else ? Un demi-sucre. Puis non tiens, noir.

dimanche 2 décembre 2012

Ma blonde n'a plus le feu au cul



31 mai 2003. Ca nous remonte loin dirait Céline. Et pourtant comme si c’était hier. Mon divorce. Non pas que j’y pense tous les jours mais presque. On ne se remet jamais vraiment d’une séparation. Je la revois souvent. On se fréquente mais en préservant cette distance. Celle des « ex ». Fil barbelé invisible néanmoins tellement présent. Peur de retomber morgane d’elle ? Assurément. Même si depuis belle lurette nos amours sont consumés, elle ne me paraît pas non plus insensible. Elle devine mes pensées. Si j’osais et sans prétention aucune, je dirais même qu’elle continue à me provoquer. Me fait de l’œil, la garce. Une vraie allumeuse quand elle s’y met. Je reste de marbre jusqu’au jour où… Mémoire de l’abbé Brel et de sa Mathilde. Faut dire qu’elle est toujours aussi désirable. Frêle et longiligne, ses courbes parfaites, légèrement arrondies, juste ce qu’il faut, goût éternel de "reviens z'y". Une beauté incendiaire.

Tourner la page ? Très difficile. Les proches, les amis, les collègues me rappellent inlassablement à son bon souvenir. Je suis loin d’être le seul à qui cela est arrivé. J’en suis conscient. Quand tu vis avec elle, depuis plus de quinze ans, tout ne s'évapore pas comme ça. On respirait le même air, à l’unisson. Mon oxygène. Et puis le trop plein. Sensation d’oppression. Un air devenu irrespirable. Le besoin de souffler, d’aller voir ailleurs. Ca fera jaser les cons, les pousse mégots, tant pis, mais je suis allé loin, très loin. Jusqu’à virer ma cuti. Pour voir. Ne pas mourir idiot. Un petit cubain. Simple passade. Et puis j’avale pas.

Mais bien sûr que j’ai fini par la haïr. De toutes mes forces. A ne plus pouvoir la regarder même en peinture. Son portrait partout. Obsédant. A devenir dingue. Des crises qui s’amplifient, de faux départ en faux départ, jusqu’à l’irréparable. D’ailleurs, c’est moi qui l’ai larguée. Je ne m’en vante jamais. Certains le font par fierté. Pas mon style. Toujours garder en mémoire le jour où tu lui as déclaré ta flamme. Nous étions sans doute trop jeunes. Faire bien devant les copains. Montrer qu’on est un Homme. Si j’avais su que les mâchoires du piège se refermaient. Sans regret. Sa compagnie comme extincteur de ma solitude.

Voici lecteur, j’espère ne pas t’avoir ennuyé avec mes peines de cœur. Peut-être trouves-tu que j’ai l’humour éteint cette semaine. Besoin de s’épancher sur mes amours défuntes. Je ne voulais pas. Le petit angelot et le diablotin perchés sur mon clavier comme conseillers. « Faut en parler, Tricao, en bien ou en mal mais ça te soulagera ! ». Alors voilà, bientôt dix années parties sans fumée, amie fidèle et vénéneuse, tu me manques. Poison de mon esprit, sur mes lèvres, au bout de mes doigts. Ma cigarette, ma cibiche, ma sèche, mon clope, mon bout d’mégot, mon clou de cercueil. Me reviennent inlassablement tes volutes et arabesques incandescentes. Dansent les gitanes jusqu’au bout de ma nuit.

mercredi 21 novembre 2012

Des tirs sur poteaux sans conséquence

Les copains d’enfance, une belle bande d’enfoirés ouais. Lecteur de peu de cœur mais paradoxalement cardiaque, veuille bien accepter mes excuses pour cette entame quelque peu abrupte toutefois il est urgent de régler mes comptes avec ces olibrius devenus mes complices au fil des années. Ce foutu temps passant à la vitesse d’un doigt de présidentiable dans le fondement d’un électeur lambda, je préfère que justice soit faite maintenant à l’encontre de ces vieilles canailles quarantenaires car bientôt se pointeront les fameux duettistes Parkinson & Alzheimer qui ne me consentiront plus à taper d’un index vengeur ce scribouillage sur écran tactile multi pouces. Et encore moins de le dicter à d’éventuelles arrières progénitures ayant préalablement planqué mon faux râtelier pour se payer ma trogne.  

Alors, vas-tu me demander, toi qui es sans ami puisque tu n’as rien d’autre à foutre que de lire ces lignes, que reprocher à ces zigotos ? Et bien une seule chose mais de taille. Alors que je blanchis sous le harnais, eux demeurent poivre et… poivre, les diables ! Même pas un léger dégarni de la calebasse sur lequel je puisse passer mes nerfs ou mon papier de verre grain P12 afin de le voir briller en société au moins une fois dans sa vie. Cette simple observation capillaire me fait hélas conclure qu’ils vieillissent mieux que moi, les bougres. Plus d’un quart de siècle pour se rendre à cette cruelle évidence alors que nous menons de concert notre radeau sous l’œil médusé des jaloux de tous bords. 
Et pourtant. Tout avait bien débuté. Une jeunesse partagée entre les parties de foot et un goût avéré pour la musique classique de feu Bashung, Noir Désir, j’en passe et des moins bons. Les études morcelant nos journées, certains optant pour un illustre diplôme scientifique tandis que je m’orientais vers un modeste baccalauréat de cas social même pas économique. Les virées nocturnes comme échappatoire commun. Libération à coups de libations.
Afin de dévoiler crânement au monde cette amitié sans faille, nous nous lançâmes également dans l'aventure radiophonique avec une émission répondant au doux patronyme printanier de « Des plumes et du goudron » mêlant rythmes bien huilés et humour grinçant. Je peux maintenant l'affirmer sans peur du ridicule : ce fût la première et dernière fois en France que chaque semaine, la totalité des auditeurs étaient réunis dans le studio même de l'émission. Puis vinrent les années Fac'. Licence (IV) option Œnologie. Les uns occupés à multiplier les débits de boisson, les autres se chargeant du crédit auprès de la gent féminine. Nos crampons toujours affûtés même si l’espoir de voir débarquer des émissaires madrilènes ou milanais commençait à s'estomper. 
Par la suite, et à l’instar du commun des mortels, la vie se chargera de nous prouver l’étendue de sa palette. Joies des mariages et naissances, larmes lors des deuils familiaux et larmes de joies considérant l’adage à la con qu’une gonzesse de perdue, c’est dix copains qui r’viennent.

Et nous voilà de nouveau réunis sur mon écran ce jour. A l'aube de la deuxième mi-temps de nos existences trépidantes. J’étais parti pour vous tailler un costard XXL, mes lascars. J’ai lamentablement échoué. «Qu'un ami véritable est une douce chose» écrivait La Fontaine. Alors les aminches, je vais juste vous remercier de m'avoir fait connaître ce sentiment. Par écrit. Pudeur toute masculine. Ben oui persifleuse lectrice, imagines-tu un seul instant Lino Ventura sortir au vieux Gabin un roucoulant « Je t’aime, mon poteau ! » ?

vendredi 16 novembre 2012

Un long fleuve (pas si) tranquille


Dix minutes. Déjà dix longues minutes que Léo Marchioni patientait à la terrasse du Caf’ des Fac’ devant une Guinness plus opaque que les Ray Ban qu’il portait. Du premier coup d’œil, il reconnut l’homme avec qui il avait rencard. Le quidam arborait une démarche conforme à l’annonce que Marchioni avait passée dans le Progrès : «Rech. H, quarantaine, présentant forte claudication pour figuration film TV, bonne rém. »
- Bonjour. Je suis la personne avec qui vous avez rendez-vous, se présenta Léo en tendant la main au passage du boiteux.
- Enchanté. Paul Rouvard, répondit l’homme en se déhanchant pour prendre une chaise à une table voisine vide de tout client.
Marchioni passa commande auprès du loufiat et fixa le postulant :
- Vous voudrez bien m’excuser mais j’ai oublié lors de mon appel, de requérir votre profession. Ce n’est pas indiscret ?
- Pas du tout. J’ai trimé pendant quinze balais comme mécano sur les locomotives aux ateliers de la Saulaie à Oullins. Un accident stupide m’a laissé sur le carreau avec une guibole raide comme la justice. Comme je vous l’ai dit, j’épluche régulièrement la rubrique emploi des canards pour mettre du beurre dans les épinards. Votre petite annonce est une véritable aubaine.
Le garçon revint avec un demi sans faux col et s’esquiva après que Léo eut réglé les consommations pour ne plus être interrompu.
- Je vais tenter d’être bref, dit Marchioni, je vous ai berné au téléphone l’autre soir. Je ne bosse pas pour le petit écran. Je sors de taule et je suis sur un coup. Vous ne savez pas mon nom et cela ne vous servirait à rien. La seule chose qui doit vous préoccuper est de savoir si vous voulez gagner sans risque trois mille euros en une demi-heure de temps. Maintenant, vous me dites banco et je vous expose de quoi il retourne ou l’on se quitte après que vous ayez sifflé votre pression. Alors ?
Devant le visage déterminé de son interlocuteur, Rouvard hésita un laps de temps infime. Le deal proposé par le malfaiteur caché derrière ses lunettes noires lui inspirait, sans savoir pourquoi, davantage de confiance que de crainte.
- Vous ne le regretterez pas, répondit Léo au hochement de tête confirmant l’accord de l’ex-cheminot. Ecoutez bien la marche à suivre car vous n’aurez aucun écrit à votre disposition. L’ancien taulard extirpa de la poche intérieure de sa veste en cuir une enveloppe kraft et la posa devant lui.
-Vous trouverez à l’intérieur mille euros d’acompte et une clef de contact. Votre job sera d’amener une voiture d’un point à un autre et basta! Le véhicule est une BMW noir métallisé qui sera stationnée quai Claude Bernard, sur le parking en face des Facultés. En partant d’ici, vous pourrez faire un repérage, c’est à six cent mètres avant le pont de l’Université. Demain matin, à six heures précises, vous prendrez le volant du coupé sport et vous vous rendrez à l’adresse programmée dans le GPS. Pas d’excès de vitesse ni de prise de risques et tout devrait bien se passer. Vous avez vingt à vingt cinq minutes de route en fonction de la circulation. Vous ne quittez pas le centre ville donc aucun souci pour rentrer chez vous. Les deux mille euros restants seront déposés sous quinze jours dans votre boîte aux lettres à l’adresse que vous m’avez fournie lors de notre prise de rendez-vous. Dernier point: pas d’entourloupe possible, je sais où vous trouver s’il vous prenait l’idée de reculer au dernier moment. Des questions ?
L’apprenti gangster fit à haute voix un rapide récapitulatif des instructions. Tout était correctement consigné dans sa mémoire. Son unique point d’interrogation portait sur le propriétaire du véhicule qui aurait pu le surprendre. Marchioni dissipa ses doutes:
- Personne dans le secteur ne connaît le possesseur de la Béhème. Ce gars est parti pour un long séjour à l’ombre, si vous me suivez...
Afin de conforter l’ancien mécano, Léo l’éclaircit succinctement sur la manière dont il s’était procuré un double de la clef par un garagiste peu scrupuleux chargé de la révision du bolide teuton.
Tout étant calé pour le lendemain, Rouvard s’éclipsa après avoir serré la main du malfrat confirmé. Ce dernier alluma une blonde, patienta quelques instants, s’extirpa de sa chaise et tourna brusquement à l’angle du bar pour s’engouffrer dans la rue Jaboulay.

Le lendemain…

«Bonjour, il est huit heures, vous êtes bien sur RTC. Les informations de notre antenne lyonnaise. Une violente explosion s’est produite tôt ce matin sur les quais du Rhône aux abords de la Faculté Lyon II. Un riverain qui promenait son chien sur le bas port a légèrement été blessé. Le témoin a indiqué, aux pompiers rendus sur place, avoir aperçu un homme, boitant fortement, en train de monter à bord d’une BMW noire. Quelques secondes plus tard, une forte déflagration a eu lieu, causant la destruction totale du véhicule et par la même le décès du chauffeur.
Après les premières investigations, les enquêteurs songent à un règlement de comptes entre voyous. Le conducteur du modèle sport de la célèbre marque allemande pourrait être Léo Marchioni, bien connu des services judiciaires, impliqué et condamné dans le fameux braquage de la Société Générale d’Annecy en mai 1998 dont le butin n’a jamais été retrouvé. Marchioni, grande figure du banditisme lyonnais, était surnommé «la Rotule» par ses ex codétenus suite à une balle reçue dans le genou  lors de la fusillade précédant son interpellation par les forces de l’ordre.»

Nonchalamment, le batelier coupa sa radio. Bien loin de s’imaginer que le passager solitaire qui arpentait le pont de la Camargue en claudiquant, venait de s’offrir la liberté. Derrière les Ray Ban fouettées par de maigres embruns, le truand laissait ses pensées vagabonder au gré des reflets scintillants du Rhône. Désormais, son destin allait se muer en un long fleuve tranquille.

jeudi 8 novembre 2012

De profundis piratibus

La Toussaint s’achève. Et je suis mort. De rire. Devant tous ces bouquets, plantes en pots et autres couronnes mortuaires déposés sur les stèles la larme à l’œil et la goutte au groin par des âmes sensibles ou allergiques aux pollens tardifs. Que veux-tu lecteur endeuillé, et pas seulement du bocal, je ricane. Bien calée entre les journées du patrimoine et la sortie du beaujolais nouveau, la visite annuelle du caveau familial chaque début de novembre figure en bonne place dans ton agenda. Des fois que les multiples foires aux vins automnales te fassent négliger une éventuelle mise en bière agrémentée d’un dépôt de gerbe en bonne et due forme.

Bien sûr, il n’est pas rare d’apercevoir des quidams, catholiques de peu de foi (car une seule fois par an), se rendant dans nos cimetières le premier du même mois, alors que la commémoration des défunts n’a lieu que le lendemain. Pas prêts de connaître les joies ineffables de la béatification, les mécréants. Ne pas confondre. Le premier novembre est le jour dédié aux élus sanctifiés par la maison mère. Exemples : Sankt Pauli et son fidèle Jolly Roger ou  Saint Patrick célébré sous forme de bock, de pinte, etc,... Sérieux, n’est-ce pas formidable ? Ouarf, ouarf. Sourire goguenard de comptoir, les voies de la canonisation demeurent impénétrables à l’agnostique qui sommeille en moi. Je préfère m’adonner au v(a)in plaisir du canon descendu en moins de temps qu’il n’en faut à la grenouille de bénitier pour croasser sa prière vespérale.

Attention. Loin de moi l’idée, lecteur baptisé au champagne, c’est toujours ça de pris, de me gausser de tes pieux égards envers le Très Haut. Je me refuse à faire partie du lot des intégristes de tout poil, adorateurs ou pourfendeurs de croyances. Tu connais mon individualisme ? Dis moi qui tu suis, je te dirai qui je hais. Chacun son parachute, et rendez-vous au tas de sable. Cible de tout atterrissage final jusqu’à preuve du contraire. Parce que pour ce qui est de s’élever vers les cieux éternels, à part postuler comme homme canon ou perchiste sur vitaminé, j'ai des doutes.

Alors que je me recueillais sur un banc d’église lors du décès d’un mien aïeul et que j’en profitais pour exhorter le Barbu de me rendre Léo Ferré en échange de David Guetta, ma cadette qui n’en rate pas une, m’apostropha en ces termes : « Et toi, Papa, tu veux être incinéré ou enterré ? ». Ni l’un, ni l’autre. T’as rien d’autre en vitrine ? C’est ça le choix ultime ? Becqueté par des asticots nécrophiles ou lyophilisé dans un micro-ondes estampillé Borniol ? Non ? Bon. Vous déciderez sans moi. Vote à main levée ou billet dans l’urne. Funéraire.

vendredi 2 novembre 2012

N'enfoncez pas l'clown !



Les caravanes sont de retour dans ma ville. Le chapiteau fièrement dressé comme le drap de dessus d’un octogénaire hospitalisé pour surdose de viagra absorbé. Le charme désuet des rangées de bancs inconfortables autour de la piste ensablée. Mes princesses ne me demandent jamais de les emmener au cirque. Je leur fais toujours la surprise. Viendra le jour où elles feindront de croire que c’est le froid voire une conjonctivite passagère qui humidifie les yeux de leur paternel quand je les observe en douce applaudir aux exploits des trapézistes et autres jongleurs dans le halo des projecteurs. 

Que veux-tu, lecteur sans cœur, le plus beau métier du monde, c’est Clown. Parfaitement, avec un « C » majuscule. Parce que ce terme est devenu tellement péjoratif voire insultant dans ta bouche. Pauvre idiot. Je te botterais volontiers le derrière à l’aide de mon 86 fillette. Et puis non. Une simple giclée de flotte dans ton œil bovin issue de la grosse marguerite (pas la vache, la fleur,  espèce de con génital) qui orne mon revers de veston multicolore. 

Les augustes me poursuivent depuis tout môme. Ou je leur cours après. Va savoir. La panoplie et le nez rouge, comme premier paravent de ma timidité de jeune bambin. Puis l’assurance provocatrice et rebelle des clowns électriques de feu OTH ou du joyeux merdier des Béru. Enfin, l’âge aidant, l’humour grinçant comme politesse du désespoir. « Il faut se méfier des clowns, ils disent parfois des choses pour rigoler ». Bien jeté, Guy Bedos lors d’un passage au… cirque d’Hiver.

Le bon clown est facilement reconnaissable. Un travail d'orfèvre remis chaque jour sur le métier. Une palette gestuelle aérienne. Noureev revisité par Chaplin. Rien de plus difficile que de jouer la gaucherie adroitement. Le clin d'œil complice qui laisse place à la grosse larme roulant dans la sciure. Un éventail de sons émis qui se veut sobre. Pas du rire forcé, bien gras. Non, de l’élégant, du subtil, du sous entendu. Mais riche en couleurs. Bouquet final de feu d’artifice. Virez moi ces mièvres pastels. Et la prise de risques à chaque représentation. En cela, le clown rejoint son cousin acrobate. Roulement de tambour, perché sur le fil de l'humour, sans filet, du vide au bide, seule la première lettre diffère. Tout un art, je te dis. 

Gloire soit rendue également à celui qui trimbale sa dégaine burlesque et hirsute dans les couloirs lugubres d’hôpitaux pour mômes. Des éclats de rire comme un instant de répit dans la souffrance du quotidien. La plus belle des récompenses. 

Enfin, fidèle abonné à mes scribouillages, t’auras remarqué malgré tes lunettes noires, ta canne blanche et ton labrador beige, que je viens d'évoquer un peuple par nature nomade. La route, encore et toujours. Omniprésente dans mes billets. Pour un prétendu pirate, descendre de Bison Futé, ça jure, non ? Va falloir que je consulte... Tu dis ? Une carte routière ? Ne joue pas au  plus fin, lecteur, Monsieur Loyal vient de te choisir dans le public. En piste.

jeudi 25 octobre 2012

A mon Tour


Dire que j’attendais avec impatience cette fin de mois. Découvrir enfin le parcours de la centième édition du Tour de France. Ce qui fait qu’à mes yeux, juillet est le plus beau mois de l’année. Trois semaines de devoirs d’été à redécouvrir notre géographie avec Paulo la Science comme instituteur. Le calcul mental approfondi grâce aux écarts infimes de majestueux contre-la-montre de plaine ou plus conséquents lors d’échappées montagnardes. La puissance des braquets employés comblant nos lacunes de techno physique. Ce début d’été prochain, les yeux rivés sur le programme des heures de passage du peloton bariolé, perché sur un tabouret de bistrot de ville étape, j’aurais trinqué en compagnie des fantômes de Blondin, Chany et autre Brouchon. Eux qui ont connu l’ultime échappée.

Mais les marchands du temple ont encore tout salopé. Relayant la Grande Boucle au rayon promotions chez Dopage land. Quand la chimie prend sa revanche sur les autres matières. Déjà le coup mortel des oreillettes de course aurait dû nous mettre la puce à… l’oreille. « Ils » étaient en train de tuer le panache et le suspense. Puis les mythiques maillots devenus guenilles. Jaune comme un échantillon d’urine frelatée. Les pois rouges de honte et bientôt convertis en rayures de bagnard. Vert comme l’éternel espoir une fois de plus bafoué. Les forçats de la route déroutés. A se planter un rayon de vélo dans le bras en guise d’injection mortelle. Vision cauchemardesque de mon Tour titubant comme Simpson sur les pentes du Ventoux 67.

Rien à battre. Ils ne l’emporteront pas au paradis des tourneurs de manivelles. Ma petite reine va redescendre de sa tour d’ivoire et faire chasser ces fous par son preux chevalier. A l’instar du pékin téméraire devant les chars de la place Tian Anmen, je me planterai avec mon biclou devant la voiture-balai parrainée par Pognon & Fils. Je remonterai  le gruppetto avec la bravoure du simple porteur de bidon. Puis de déchirer les tribunes charognardes issues des mêmes quotidiens que l’on glissait sous le maillot avant de basculer dans des descentes vertigineuses.

Même si il est trop tard car les chiens continueront d’aboyer une fois la caravane trépassée. 

vendredi 19 octobre 2012

Jet d'ancre et impressions


Putain de météo. Encore que. Un mal pour un bien. Le soleil a rendu les clefs laissant place aux intempéries automnales. Révolu le temps des escapades motardes et rêveries du fond d’un hamac ombragé. Le grizzly a rejoint sa tanière. Bienvenue non pas au vélo d’appartement (quelle connerie !) mais à mes divines lectures sur divan moelleux. Oui, facétieux lecteur, même mon canapé lit. Ouarf, ouarf.
La lecture. Celle que l’on nomme pompeusement « littérature » dans ta petite lucarne. Lire. Comme une drogue. Tout ce qui me passe sous la main. Du bulletin municipal au dictionnaire en dix volumes. Sans oublier le cri du polar le soir au dessus des rayons de ma bibliothèque qui m'invite derechef. Peux pas résister. Le pirate happé par les sirènes. Bouquins acquis de-ci de-là, au hasard de mes pérégrinations dans de modestes salons du livre provinciaux. Pas bégueule, le manuscrit, il s’adapte à l’environnement. En vrac dans des cagettes sur les étals de marché ou sur ceux de vieux bouquinistes, clope au bec, godet de blanc dans une main et roman policier dans l'autre, bien planqués à l’ombre des platanes bordant le fleuve (noir) et ses rivages (noirs).

Et ne viens pas me causer de livres numériques. A l’ancienne, Lucienne ! Tellement peur de perdre les sensations. Manipuler un ouvrage sous toutes ses coutures, tourner avec délicatesse une simple page, retrouver une fois encore l’odeur du parchemin calligraphié. Imprimeur de St Amand Montrond dans le Cher, dealer d’encre noire de mes nuits blanches, je te salue !

Mais par quoi débuter, juvénile lecteur ? Roman, biographie, nouvelle ? Peu importe. Alors file voir ton p’tit libraire, ta gentille bibliothécaire, et embarque pour l’aventure. Franchis la passerelle. Hisse la grand-voile. Largue les amarres. L’évasion. Le voyage imaginaire à peu de frais. Mieux que le cinéma. Tu choisis tes décors et tes acteurs. D’où le problème de l’adaptation sur grand écran.  Rarement en osmose avec ce que tu avais imaginé.
Des auteurs comme autant d’escales. Un écrivain en appelle toujours un autre. J’ai commencé adolescent par un texte de Desproges qui mentionnait F. Cavanna qui évoquait F. Dard qui citait L.F. Céline, etc, etc… Tu m’as compris. Contre-pied parfait d’un prof' de collège qui nous faisait parcourir le chemin inverse en débutant par le « classique » sans posséder le bagage adéquat. Un coup à te former des légions de followers décérébrés. L’horreur. 
Je te laisse. Cendrars le bourlingueur m'attend depuis trop longtemps sur la jetée. Je lève l'encre de nouveau.

jeudi 11 octobre 2012

Le drapeau noir flotte sur la marmotte


Un cri pirate. Pourquoi ce blog a-t-il été baptisé ainsi ? Excellente question, ami lecteur. Je te remercie de ne pas me l’avoir posée avant. « J’aurais dû commencer par ce post » dis-tu ? Ouais. Ne sachant toujours pas où cette saga scribouillarde va nous mener, comment prévoir un quelconque ordonnancement dans mes billets d’humeur, petit malin. Et puis je fais comme je l’entends. Seul à bord. « Tais toi et tape » persifles-tu. Bon ok. Forçat du clavier, je me remets à la tâche comme le galérien pousse sur son aviron lorsque le capitaine a décidé de faire du ski nautique.

Alors primo, cette locution de hurlement pirate est tirée d’un des plus beaux écrits de la chanson française. Ferrat dans le texte. « Je ne suis qu’un cri ». Braver l’interdit, exprimer sa révolte. Une grenade dégoupillée dans la mare des jacasseries quotidiennes. Voilà pour le sens figuré.
Secundo, l’imagerie corsaire m’a toujours fascinée. Depuis tout môme. Brel reprochait à ses aïeuls de lui avoir chouravé le Far West de son enfance. Pour mézigue, c’est la piraterie. Arpenter le pont d'un brick ou d'une frégate, manipuler voiles et cordages auprès des Long John Silver, Barbe Noire, et autres Jack Sparrow. Bien que pour ce dernier, je l’ai connu  sur le tard. Mais quand ton dabe se nomme Keith Richards, forcément I can get satisfaction…

Je te vois venir, gentille lectrice. Déjà à me taxer de misogyne en me reprochant de n'évoquer encore et toujours que la gent masculine. Si je te cause de Bloody Mary, tu vas te demander si je n’ai pas préalablement sniffé le Tabasco contenu dans ce succulent breuvage. Erreur grave. Ce fût tout simplement le surnom de la plus célèbre flibustière que les océans  aient porté. Mary Read de son état civil. Courageuse et insoumise.

Compagnons conchieurs d’étendards en tous genres, avouez quand même que le pavillon corsaire flottant au vent pousse à la rébellion, à la mutinerie internationale. Tu ne me crois pas, sceptique lecteur ? Par ces temps de crise mondiale, la flibuste va signer son retour. Planquez vos barques les marins d’eau douce, et vous les plaisanciers de la finance vos galions devenus yachts de luxe. Ca va tanguer. Foi de Haddock. Ou plutôt de Rackham le Rouge. Parce que si tu préfères zyeuter du côté des promesses électorales, autant aller filer la main à la marmotte pour mettre le chocolat dans le papier alu.


jeudi 4 octobre 2012

Vieux motard que jamais




Les jours suivent et se ressemblent. La radio me crache dans le caoua matinal un énième allongement de la durée de travail. Madame Retraite ricane en compagnie de Monsieur Roblot devant la file d’attente de la boutique Paul Emploi. En attendant, ma place est dans le traffic, cabrelisais-je. Moto, boulot, dodo. Mais MOTO. Chevaucher triomphalement mon fidèle destrier sorti d’Hinckley. Plaisir futile quotidien. Même pas une question de vitesse mais de liberté. Bien mieux que le train, le bus, le métro ou la bagnole. Sensation d’indépendance pour misanthrope claustrophobe. Toujours ce sentiment de partir à l’aventure. Rêve hélas éphémère. Into the wild rattrapé au lasso par Brazil.

Un matin, je ne vais pas m’arrêter. Bref mais rageux coup d’accélérateur. Laisser ce job en carafe. Finies la routine et les sempiternelles lamentations météorologiques des collègues, les maigres congés surlignés du calendrier mural dignes d'un bagnard gravant ses bâtons quotidiens sur les murs de sa geôle. Gaz. Crazy rider. Destination inconnue. Pluie d’escales infinie. Juste la Route avec un R majuscule. Le feu a un pouvoir hypnotique. Personnellement, ce sera davantage les flaques d’eau virtuelles au bout des lignes droites noyées sous le soleil brûlant me guidant toujours vers d’autres contrées. Mes lectures sanglées sur le porte bagage. Le Voyage de Céline, Kerouac ou Mac Carthy dans leur périple apocalyptique. A l’instar de Redford murmurant aux oreilles de la Jolly Jumper’s family, je fredonnerai à mon pur-sang d’acier les refrains de deux honorables contemporains du rock. Born to run et on the road again. Madame Retraite évanouie dans le fond des rétroviseurs. Paul Emploi aidant Monsieur Roblot pour la mener à sa dernière demeure.

Mais il est tard, monsieur… Faut que je rentre chez moi…

jeudi 27 septembre 2012

Je vous hai...me.


Je n’aime personne. Ou variante, je hais le monde entier. Me fait-on savoir après décryptage de mes écrits. D’abord,« on » est un imbécile. Là où tu causes aigreur, je jacte lucidité. Cela posé, est-ce ma faute si sa naissance passée, l’Homme devient con. Alors que faire ? Aller voir ailleurs ? Toujours pas de preuve de vie sur les planètes proches. Ou alors plus malins que nous, les extra terrestres. Le Pierrot lunaire qui a vu débarquer Armstrong durant l’été 69, qui nous dit qu’il n’est pas allé planquer son transat et son parasol derrière le premier cratère venu ? Réciproquement, le premier E.T. de carnaval cosmique qui se pointerait sur votre bout de pelouse, vous auriez sans doute la même réaction.
Donc fier d’être terrien ? Bof. Pas un continent pour rattraper l’autre. Même les pôles. Pas demain la veille que tu me verras sucer un esquimau. L’Afrique ? Cocktail mortel de religion, famine et esclavage. Ce dernier grief en commun avec l’Asie et sa population de quatre milliards. Trop dense pour un fainéant d’individualiste forcené. L’Océanie et ses îles ? Caricature de Mad Max en Range Rover poursuivant Skippy entre deux parties de cricket. Super. Esprit de colon comme l’américain. Du Nord. Panoplie de shérif mondial. Qui s’y connaît en matière de génocide. « Holocauste » revisité par John Wayne. Tout petit déjà, je préférais les frangins de Bronco Apache aux visages pâles. Après, tu as le sud amerloque. Drogue, foot et misère. Tiercé dans l’ordre. Le PMU version cartels. Tu remarqueras, souvent cette même différence entre Nord et Sud, échelle continentale ou planétaire.
Mais poursuivons la démonstration. Reste l’Europe. L’Italie, le Portugal et l’Espagne, autrement dit, notre Sud à nous. Seuls les britanniques et leur humour pourraient trouver grâce à mes yeux. Malheureusement, hooliganisme à poils courts et cupidité viennent jeter une ombre au tableau. Un exemple ? Le Heysel en 1985. Occire du transalpin sous prétexte que ce dernier refusait de rendre les canettes de bière préalablement vidées et lancées volontairement sur les supporters rivaux. Oui mais consignées. Avarice quand tu nous tiens. Quant aux allemands et leur carafon de donneurs de leçons : économie, sport, éducation… Z’ont sûrement zappé l’attentat de Séville 82. Pas moi. Ma seconde guerre mondiale. Battiston über alles.
Ta conclusion, lecteur téméraire puisque tu lis ces dernières lignes, est que je ne chérirais que les français. Encore raté. Pas le moins du monde. Je vais t’épargner les multiples raisons de ce désamour qui feront, un jour peut-être, l’objet d’un autre scribouillage. En attendant, je vous hai….me.

jeudi 20 septembre 2012

Tweet and shoot



« T'es pas sur Facebook ? ». Non. Je n’ai pas de compte. Volontairement. Non par peur du flicage car je pense depuis longtemps que Big Brother ricane au dessus de la tombe profanée de son créateur Orwell. Plus simplement, je possède déjà ce blog qui permet d’exprimer ce dont j’ai envie et sans la moindre contrepartie. Seul à bord. Donc ne viens pas geindre, toi le converti du zéro social. Je te cède ma place sur le réseau, tu pourrais dire merci au looser asocial.
Je ne touite pas non plus. Répertorié de longue date Agefiph du texto par mes proches,  je ne suis plus à ça près. Taper la converse entre 140 (je cause du nombre de caractères autorisés, pas du QI des protagonistes, hein !) afin de faire baver plus tard des lobotomisés avec ce fameux retweet décroché de haute lutte à de pseudo personnalités. Atrophiés de la langue autant que du cervelet. A croire que ton but unique est d'obtenir la consécration dans le Guinness Book, rubrique nombre de followers. Prouver que tu existes, que tu possèdes un carnet d’amis, de relations. Tout là bas. A l’autre bout du réseau. Si proche et si loin à la fois. Je t’observe en loucedé le greffé de l’aïe faune. Le mobile comme un prolongement de la pince du père Adam. Ami manchot, ne te biles pas, ils ont pensé également à toi : oreillette et micro au rayon accessoires. La Vénus de Milo réhabilitée par Oranbouysfree.
Quant à ce besoin perpétuel de demander ou rendre des comptes. Actes comme paroles. Partout. A tout le monde. Quel que soit le lieu, l’heure, la moindre vibration smartphonesque et tu dégaines aussi vite que James Coburn son couteau dans les Sept Mercenaires. Exemple encore ce jour. Une mégère au faciès lasuré Casto spéciale champignons et moisissures, vitupère dans son gadget nippon sous les regards courroucés de la file d’attente démesurée d’hypermarcheurs dont je fais hélas quelquefois partie lorsque le frigo familial ressemble aux bourses d'un président du FMI après un bref passage dans un Sofitel amerloque. « T’es où ? » questionne Miss Syntilor. « Dans ton c… » me pris-je à espérer fortement comme réponse de l’interlocuteur, après qu’elle n’eut daigné poursuivre le déchargement de son caddie blindé sur le tapis roulant pour cause de curiosité maladive.

Autre scène vécue lors d’un récent repas de noces. Mélange de famille éloignée, amis d'enfance perdus de vue et parfaits inconnus. Pas grand chose à se dire. Du silence gêné des entrées à la chape nappée de plomb des desserts. Les regards hagards sur la nappe où trône en bonne place leur nouvelle raison de vivre. Les uns à envoyer la sauce sur leur écran tactile entre deux plats, les autres aux doigts boudinés écrasant leur clavier azerty taille XXS. Conclusion : toute la tablée fixée sur son joujou branché. Mieux que la pause clope comme échappatoire. Les rhumatismes articulaires gagnant du terrain sur les poumons goudronnés. Le progrès ne vaut que si il est partagé par tous. Imperturbable naufragé au milieu de ces ondes, j’ai lancé l’appli’ non virtuelle « Dégustation de jéroboam labellisé Mumm ». Quitte à survivre dans sa bulle autant que cette dernière soit de qualité. Shoot again. Tchin.

mercredi 12 septembre 2012

Veni, vidi, Xavi.

Je vais vous faire un aveu. J’aimais me déplacer afin de contempler la chose footballistique. Oui, je sais, chers abonnés de l’Art du Potager Magazine ou de Belles-lettres Hebdo, ne vous taillez pas tout de suite les veines à l’économe ou au marque page affûté, nobody is perfect. La dégustation d’un kebab sauce blanche acquis chez mon aubergiste ottoman favori avant le coup d’envoi, le postérieur bien calé sur de modestes gradins de stade balayés par les rayons d’un soleil estival couchant, comme dirait ma progéniture, je kiffais grave.

Mais soyons plus précis. D’un point de vue individuel, j’affectionne particulièrement les joueurs élégants et techniques. Comme jadis Monsieur Johan Cruyff. J'écris « Monsieur » dans le cas où ce dernier lise cet admirable post et m’envoie deux billets pour assister aux dernières représentations de Xavi, autre élégant encore en activité mais hélas pour combien de temps encore. Voir dans son antre du Camp Nou le maestro à la baguette, moulée ou vissée en crampons de 16 peu m'importe,  puis mourir, dussé-je me passer de mon ultime kebab d’avant match.

Sinon, je ne trouve pas déplaisants les forçats de l’entrejeu, ces laborieux volontaires qui savent se mettre au service des élégants techniques. Comme par exemple, euh…. Comme beaucoup de milieux défensifs dont je tairai le nom pour ne pas offenser leurs familles ou connaissances qui dévorent également ma prose par milliers. Collectivement parlant, des clubs aussi éclectiques que Barcelone, Liverpool ou le modeste Sankt Pauli m’ont toujours séduit. Un passé, une ambiance, des spectateurs qui honorent l’appellation de « supporters ». Et c’est précisément là, après moult péripéties verbales, que je voulais en venir.

J’aimais aller voir du foot. Pourquoi cet imparfait péremptoire ? Parce que je me rends de moins en moins dans les enceintes sportives dédiées au ballon rond. Manque de spectacle ? Non. A chaque génération n’éclot pas forcément de virtuose ou un jeu collectif bien léché. La lassitude devant l’omniprésence du football sur nos ondes ? Non plus. Personne ne me met un flingue sur la tempe. Alors quoi ? Juste par ta faute. Oui, la tienne. Toi, mon ex voisin de tribune et maintenant même plus de canapé domestique sous peine de carton rouge distribué au Magnum 44 ou au Beretta 92 fillette par mes bons offices. Lis moi bien, toi le jeune ou vieux braillard - le temps n’y fait rien à l’affaire dixit Tonton Georges, gardien éternel du FC Sète – toi donc qui éructe la bave aux lèvres, par haine, jalousie, esprit de clocher, snobisme ou que sais-je encore sur les qualités, le physique, l’âge pseudo canonique, les supposées orientations sexuelles et professions maternelles de mes élégants préférés du rectangle vert, je te conchie définitivement. Ainsi soit-il.

mercredi 5 septembre 2012

Vigie pirate ?


Bon. Ben voilà. Un de plus. De quoi ? Un anniversaire ? Non, un scribouillard du Net. Donner vie à son propre blog, première étape réussie. Même un technopathe comme mézigue sera parvenu à ses fins. La mise en forme, on verra ça plus tard. Ou pas, pour reprendre une expression en vogue (fréquemment synonyme de « à la con »).

Autoriser les commentaires ? Et puis quoi encore. Me coltiner les pleurnichards du clavier, les trolls azimutés, les mous de la syntaxe et dans le pire des cas une poignée d’aficionados ivres morts... Plutôt crever ! J’ai loué cet espace pour être au calme, ne pas être dérangé. T’as envie de broder sur ma prose, jauger, flinguer, encourager mes humeurs vagabondes ? Va voir mes voisins de palier virtuels, tu trouveras sûrement le pékin amoureux de ses stat’ visiteurs. Le clampin qui mouille au nom de l’amitié ou de la haine en réseau, tu dois pouvoir trouver ça.

Alors, de quoi qu’ça va causer ? Je verrai. De tout ou de petits riens. Quand ? Je n'sais pas. Ni payé à la ligne et encore moins au mois. Je pointerai ma plume quand l’envie se fera pressante. Ecrire comme tu vas pisser. Pour le plaisir de se soulager. Lire m’est vital. Noircir de l'écran, pas encore. A l’instar des aventuriers des mers, je pars naviguer en solitaire. Le Tabarly de la toile. Surfer avec ou sans vague à l’âme. Vigie en alerte. Juste observer de loin mes contemporains (cons tant porcs hein ?) comme Georges De Caunes aux Marquises dans les années 60. Vieux loup des terres recherche havre de paix. Chiants s’abstenir. Gaffe au cri pirate, les moussaillons !