dimanche 13 janvier 2013

L'avocat des poireaux


500 connards sur la ligne de départ et un blaireau - votre serviteur - devant sa lucarne ex cathodique. Ben ouais, nobody is perfect. Renaud n’a pas tort. Mais lui aussi m’a parfois déçu par le passé. Donc match nul. Donc billet sur le Dakar. D’accord ? Je ne rate jamais la quotidienne télé. La course, je m’en cogne. A un point. Tiens, pour te prendre un exemple dans l’actualité récente, comme du pseudo fisc fucking de Depardieu. Les chronos et pénalités, les favoris des pros team bardés de sponsors, les bagnoles au tuning improbable, les camions aux allures de bennes à ordures idem. Une seule chose me scotche sur mon moelleux canapé à l’heure apéritive : les poireaux sauce chili.  

Non charmante lectrice, amatrice des fiches cuisine de Femme Actuelle, ne te mets pas la rate au court bouillon, ton scribouilleur adoré n’a pas encore le citron qui prend la tangente ou le bocal fêlé. « Poireau » est le surnom dont sont affublés les amateurs, les sans grade qui participent pour la première fois à un raid. Avec terminer l’aventure comme seul but. Pas d’assistance mécanique ni de douillet camping car, contrairement aux riches écuries que je qualifierais de grosses légumes. Que le système D et une clef de quinze en bandoulière. La solidarité entre motards ou avec le public enthousiaste venu les encourager.

« Sauce chili » car tu n’es pas sans ignorer, lecteur dont le GPS ne sert que pour tirer jusqu’au tabac le plus proche les jours fériés, que le Dakar se passe sur les terres sud américaines depuis quelques années déjà. Spectacle grandiose. Farandole d’aquarelles qui te font passer des dunes à la rocaille de la cordillère tout en survolant la pampa. Visite et rencontre (trop) express des grandes agglomérations ou modestes villages et de leurs âmes hautes en couleurs. Tout est réuni. La palette météorologique également à son apogée. Des rafales de vent à l’instar des tempêtes de sable subsahariennes. Ce n’est pas à toi que je raconterais des salades, tes dents peuvent en témoigner lecteur, les poireaux et le sable n’ont jamais fait bon ménage. Plus de quarante sous le casque et sur la piste un jour et moins dix le lendemain à 3600 mètres d’altitude. Et moi comme un con, bien calé dans mon sofa à côté du poêle flambant neuf, avec tout le whisky que je m’envoie, et moi, et moi et moi…  

Sache que je ne l’envie pas ce pilote obscur mais émérite. Mille chutes plus ou moins spectaculaires, se relever autant de fois, s’enliser, cohabiter avec le stress des délais, l’ombre de l’hélico des commissaires de course planant au dessus de sa bécane, très peu pour mézigue. Je souhaite demeurer un simple invité sur son périple, témoin d’une passion qui le pousse au bout de ses forces physiques et mentales. Il est la légende des rallyes. Lui seul. Je remarque que la presse française ne parle jamais de son cas. Si ce n’est lors de son décès accidentel, bien sûr. Bande de vautours. « Les charognards sont là, la mort ne vient pas seule » chantait la chetron sauvage à qui je réclame l’indulgence pour le scribouillage d’aujourd’hui. Putain, je ne demande pas le Pérou quand même ! Bon d’accord, un peu mais en compagnie de l’Argentine et le Chili, s’il te plaît…